Quelques lignes d'André Carbonel, démineur français mort pour la France, le 29 septembre 1949 à 60 ans en Tunisie.
POUR EUX...
Pour eux vous aviez ri de l'insigne macabre qui disait le danger
Et armé très souvent d'une pointe de sabre, vous aviez déminé !
Pour eux vous aviez su désamorcer la mine sans trembler de vos mains,
Pour que vienne plus tard sur ce sol de famine et le pain et le vin...
Pour eux vous aviez dit : "Ils seront sans angoisse sur ce qui fut miné
Et sans crainte, ils iront vers la mer qui délasse le labeur terminé !"
Pour eux vous aviez pris la pelle et la pioche, creusé profondément
Pour extraire de terre aussi lourde que la roche la bombe du tourment...
Pour eux vous aviez dû quitter votre famille, votre bien, votre ciel
Pour aller au pays où la lumière vrille où le sable est le fiel...
En eux vous aviez mis un Cœur, une parole, et un Espoir subtil !
Leur cœur est desséché ; leur parole s'envole éloigné le péril !
Pour eux vous avez fait, sacrifice suprême, le don de votre corps
Qui fut déchiqueté ou réduit à l'extrême... Est-il plus triste sort ?
Dans le cœur des vivants, cœur plus dur que la pierre, votre image n'est plus,
Ö Morts ! Morts qui reposez sur ou sous la terre, Amis qui n'êtes plus !...
A. Carbonel (juillet 1949)